témoignage personnel
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témoignage personnel
Merci tout d’abord à vous qui avez eu le courage de témoigner publiquement, de vous exposer au grand jour et de créer l’association « La parole libérée » avec toutes les conséquences que cela implique. Bravo ! Je suis de tout cœur avec vous.
Les récentes émissions sur la pédophilie dans l’église, ont retenu toute mon attention. Après une période d’hésitation, je me sens prête aujourd’hui à sortir du silence dans lequel je suis restée murée pendant si longtemps. Même s’il n’est pas facile d’accepter de s’exposer aux yeux de tous, je ressens et je comprends l’importance de témoigner, c’est pourquoi j’ai souhaité m’exprimer sur votre forum.
J’avais environ 13 ans, lorsque j’ai subi des attouchements de la part d’un prêtre.
Nous habitions à la Croix-rousse, à Lyon. Ce prêtre s’était lié d’amitié avec mes parents durant la période où il était vicaire de notre paroisse et passait souvent à la maison à l’improviste, où il était toujours chaleureusement accueilli. Après avoir quitté la paroisse, il fut nommé aumônier dans un lycée de jeunes filles à Lyon, mais il continua de nous rendre visite et de venir manger à la maison. C’est à cette période qu’il abusa de moi. Mes parents, catholiques et pratiquants, accordaient toute leur confiance à cet homme d’église. De plus, ma mère était très investie dans la vie de la paroisse et de l’école libre du quartier.
Aussi, lorsque je parlais à ma mère de ce qui m’était arrivé, elle refusa catégoriquement de me croire, coupant court à toute discussion sur le sujet.
Bouleversée, je reçus comme une gifle en plein visage, cette double trahison dont je ne pouvais parler à personne. Atterrée, désorientée, je n’eus d’autre choix que de vivre comme si de rien n’était, refoulant comme je le pouvais, douleur, tristesse, désarroi et colère au plus profond de moi…et le prêtre continua comme si de rien n’était, de venir partager notre gite et notre couvert, en toute impunité.
De plus, ma place d’ainée dans la fratrie, impliquait que je donne l’exemple.
Je compris que les choses telles que celles que j’avais subies de la part de ce prêtre, n’avaient pas droit au chapitre…L’idée même qu’elles aient pu arriver au sein de notre famille, était inconcevable, inacceptable. Quel genre de fille indigne étais-je donc, pour oser venir troubler la quiétude familiale, au risque de salir son image, et de ternir la réputation de l’église et de ses prêtres ?
Je compris plus tard, que pour ma mère, l’accepter et le reconnaître, aurait fait écrouler le bel édifice de convictions et de croyances sur lesquels reposaient sa vie, sa famille et ses engagements.
En attendant, ces évènements eurent pour effet d’endommager gravement ma confiance en moi et mon estime de soi. J’étais habitée par la confusion. J’éprouvais un profond dégout et beaucoup de colère, envers ce monde d’adultes que je trouvais hypocrite et sournois, et dont j’étais complice malgré moi. Mais j’étais condamnée au silence. Coincée dans cette situation sans issue, j’éprouvais honte et culpabilité et ruminait ma colère…tandis que mon agresseur jouissait d’une parfaite immunité.
Épisodes de déprime et épisodes de révolte se succédèrent, accompagnés de problèmes de dos récurrents…difficulté à contrôler mes émotions, sensibilité à fleur de peau, aversion pour tout ce qui touchait au corps, difficultés relationnelles, anxiété, etc…les traumatismes subis au début de mon adolescence, ne manquèrent pas de se rappeler à mon souvenir tout au long de ma vie…car le corps n’oublie pas.
Ce furent l’amour et l’innocence d’une petite sœur arrivée dans notre famille quelque temps après ces évènements, qui m’apportèrent le précieux réconfort dont j’avais tant besoin à cette époque, en me redonnant goût à la vie.
La passion avec laquelle je m’investissais dans mon métier d’Educatrice de Jeunes Enfants me fut aussi salutaire.
Au fil du temps, l’amour et la patience de mon mari, l’amour et la présence joyeuse de nos enfants, m’ont apporté aide et soutien.
Enfin, l’écriture et la méditation, ont grandement contribué à m’apporter l’équilibre dont j’avais besoin pour avancer dans la vie… (qui fût tout de même une sorte de combat intérieur permanent )
Suite au décès de ma mère, en 2014, les choses enfouies qui m’étouffaient de l’intérieur, ces choses tenues au secret au plus profond de moi, ont refait surface …
C’est seulement en 2017 que « les mots pour le dire », sont venus spontanément sous ma plume. J’eu pour confidente simple une feuille de papier blanc, sur laquelle je pus enfin déposer mon fardeau, me libérer du joug qui m’avait contraint à courber l’échine durant tant d’années.
J’en ai ressenti une réelle délivrance, une véritable libération. J’assistais à une sorte de métamorphose intérieure, quelque chose comme une réconciliation entre l’enfant blessée blottie en moi, et la femme que j’étais devenue.
Réconciliation avec la vie, avec moi-même. Désir de pardonner, pour avancer.
J’ai ressenti une sorte de légèreté jusqu’alors inconnue, emplir mon être.
Aujourd’hui, j’ai la sensation de commencer à vivre pleinement, d’une manière toute nouvelle.
La femme de 65 ans que je suis devenue, sent éclore en elle, une vie pleine de promesses et de joie.
Je me sens vivante, apaisée, libérée des entraves du passé, pareille à une fleur en pleine éclosion, qui s’ouvre enfin au monde !
En ce qui me concerne, il y a depuis longtemps prescription des faits. Cependant, je ressens qu’il est de ma responsabilité aujourd’hui de révéler ces faits au grand jour, sans peurs, ni appréhensions.
J’ai appris que ce prêtre avait été par la suite envoyé en Afrique…et je fus atterrée de découvrir (en regardant le reportage sur la pédophilie dans l’église) que c’était une pratique avérée, au sein de l’église, de « résoudre le problème des prêtres connus pour pédophilie », en les envoyant poursuivre leur ministère en Afrique !...sans commentaires !
Pour information, le prêtre dont je parle se nomme Daniel Bonnet.
J’aimerais savoir si vous avez-vous déjà reçu d’autres témoignages de jeunes filles qui auraient aussi été victimes des agissements malsains et pervers de cet homme ?
J’aurais souhaité pouvoir témoigner plus tôt, mais je ne le pouvais pas.
Même 50 ans après, si mon témoignage peut servir à faire avancer une cause, à étayer un dossier, ou simplement à inciter des personnes en souffrance à s’exprimer sur ce qu’elles ont subi, j’en serai pleinement satisfaite.
Les récentes émissions sur la pédophilie dans l’église, ont retenu toute mon attention. Après une période d’hésitation, je me sens prête aujourd’hui à sortir du silence dans lequel je suis restée murée pendant si longtemps. Même s’il n’est pas facile d’accepter de s’exposer aux yeux de tous, je ressens et je comprends l’importance de témoigner, c’est pourquoi j’ai souhaité m’exprimer sur votre forum.
J’avais environ 13 ans, lorsque j’ai subi des attouchements de la part d’un prêtre.
Nous habitions à la Croix-rousse, à Lyon. Ce prêtre s’était lié d’amitié avec mes parents durant la période où il était vicaire de notre paroisse et passait souvent à la maison à l’improviste, où il était toujours chaleureusement accueilli. Après avoir quitté la paroisse, il fut nommé aumônier dans un lycée de jeunes filles à Lyon, mais il continua de nous rendre visite et de venir manger à la maison. C’est à cette période qu’il abusa de moi. Mes parents, catholiques et pratiquants, accordaient toute leur confiance à cet homme d’église. De plus, ma mère était très investie dans la vie de la paroisse et de l’école libre du quartier.
Aussi, lorsque je parlais à ma mère de ce qui m’était arrivé, elle refusa catégoriquement de me croire, coupant court à toute discussion sur le sujet.
Bouleversée, je reçus comme une gifle en plein visage, cette double trahison dont je ne pouvais parler à personne. Atterrée, désorientée, je n’eus d’autre choix que de vivre comme si de rien n’était, refoulant comme je le pouvais, douleur, tristesse, désarroi et colère au plus profond de moi…et le prêtre continua comme si de rien n’était, de venir partager notre gite et notre couvert, en toute impunité.
De plus, ma place d’ainée dans la fratrie, impliquait que je donne l’exemple.
Je compris que les choses telles que celles que j’avais subies de la part de ce prêtre, n’avaient pas droit au chapitre…L’idée même qu’elles aient pu arriver au sein de notre famille, était inconcevable, inacceptable. Quel genre de fille indigne étais-je donc, pour oser venir troubler la quiétude familiale, au risque de salir son image, et de ternir la réputation de l’église et de ses prêtres ?
Je compris plus tard, que pour ma mère, l’accepter et le reconnaître, aurait fait écrouler le bel édifice de convictions et de croyances sur lesquels reposaient sa vie, sa famille et ses engagements.
En attendant, ces évènements eurent pour effet d’endommager gravement ma confiance en moi et mon estime de soi. J’étais habitée par la confusion. J’éprouvais un profond dégout et beaucoup de colère, envers ce monde d’adultes que je trouvais hypocrite et sournois, et dont j’étais complice malgré moi. Mais j’étais condamnée au silence. Coincée dans cette situation sans issue, j’éprouvais honte et culpabilité et ruminait ma colère…tandis que mon agresseur jouissait d’une parfaite immunité.
Épisodes de déprime et épisodes de révolte se succédèrent, accompagnés de problèmes de dos récurrents…difficulté à contrôler mes émotions, sensibilité à fleur de peau, aversion pour tout ce qui touchait au corps, difficultés relationnelles, anxiété, etc…les traumatismes subis au début de mon adolescence, ne manquèrent pas de se rappeler à mon souvenir tout au long de ma vie…car le corps n’oublie pas.
Ce furent l’amour et l’innocence d’une petite sœur arrivée dans notre famille quelque temps après ces évènements, qui m’apportèrent le précieux réconfort dont j’avais tant besoin à cette époque, en me redonnant goût à la vie.
La passion avec laquelle je m’investissais dans mon métier d’Educatrice de Jeunes Enfants me fut aussi salutaire.
Au fil du temps, l’amour et la patience de mon mari, l’amour et la présence joyeuse de nos enfants, m’ont apporté aide et soutien.
Enfin, l’écriture et la méditation, ont grandement contribué à m’apporter l’équilibre dont j’avais besoin pour avancer dans la vie… (qui fût tout de même une sorte de combat intérieur permanent )
Suite au décès de ma mère, en 2014, les choses enfouies qui m’étouffaient de l’intérieur, ces choses tenues au secret au plus profond de moi, ont refait surface …
C’est seulement en 2017 que « les mots pour le dire », sont venus spontanément sous ma plume. J’eu pour confidente simple une feuille de papier blanc, sur laquelle je pus enfin déposer mon fardeau, me libérer du joug qui m’avait contraint à courber l’échine durant tant d’années.
J’en ai ressenti une réelle délivrance, une véritable libération. J’assistais à une sorte de métamorphose intérieure, quelque chose comme une réconciliation entre l’enfant blessée blottie en moi, et la femme que j’étais devenue.
Réconciliation avec la vie, avec moi-même. Désir de pardonner, pour avancer.
J’ai ressenti une sorte de légèreté jusqu’alors inconnue, emplir mon être.
Aujourd’hui, j’ai la sensation de commencer à vivre pleinement, d’une manière toute nouvelle.
La femme de 65 ans que je suis devenue, sent éclore en elle, une vie pleine de promesses et de joie.
Je me sens vivante, apaisée, libérée des entraves du passé, pareille à une fleur en pleine éclosion, qui s’ouvre enfin au monde !
En ce qui me concerne, il y a depuis longtemps prescription des faits. Cependant, je ressens qu’il est de ma responsabilité aujourd’hui de révéler ces faits au grand jour, sans peurs, ni appréhensions.
J’ai appris que ce prêtre avait été par la suite envoyé en Afrique…et je fus atterrée de découvrir (en regardant le reportage sur la pédophilie dans l’église) que c’était une pratique avérée, au sein de l’église, de « résoudre le problème des prêtres connus pour pédophilie », en les envoyant poursuivre leur ministère en Afrique !...sans commentaires !
Pour information, le prêtre dont je parle se nomme Daniel Bonnet.
J’aimerais savoir si vous avez-vous déjà reçu d’autres témoignages de jeunes filles qui auraient aussi été victimes des agissements malsains et pervers de cet homme ?
J’aurais souhaité pouvoir témoigner plus tôt, mais je ne le pouvais pas.
Même 50 ans après, si mon témoignage peut servir à faire avancer une cause, à étayer un dossier, ou simplement à inciter des personnes en souffrance à s’exprimer sur ce qu’elles ont subi, j’en serai pleinement satisfaite.
Marie-Pierre Pardon- Messages : 2
Date d'inscription : 11/06/2018
Re: témoignage personnel
Merci pour ce témoignage dans lequel je me retrouve beaucoup. Et bravo pour le courage de parler.
Je me retrouve dans l'ami de la famille, homme d'église, qui a toute la confiance de la famille.
La déprime, le mal de dos récurrent, l'écriture et l'expression pour se libérer, le manque de confiance, la révolte face à l'incompétence et à l'hypocrisie des institutions, mon frère - victime du même curé - qui ne "voulait pas faire de vague dans la famille"...
Je n'ai parlé qu'à 32 ans, quand les souvenirs me sont remontés. Et j'ai la chance que mes parents m'aient cru tout de suite.
Votre témoignage a été posté il y a un an déjà, je viens de le découvrir. Merci. Plus nous serons nombreux à témoigner, plus les incrédules et les aveugles seront forcés de voir les choses comme elles sont.
Jean-Luc
Je me retrouve dans l'ami de la famille, homme d'église, qui a toute la confiance de la famille.
La déprime, le mal de dos récurrent, l'écriture et l'expression pour se libérer, le manque de confiance, la révolte face à l'incompétence et à l'hypocrisie des institutions, mon frère - victime du même curé - qui ne "voulait pas faire de vague dans la famille"...
Je n'ai parlé qu'à 32 ans, quand les souvenirs me sont remontés. Et j'ai la chance que mes parents m'aient cru tout de suite.
Votre témoignage a été posté il y a un an déjà, je viens de le découvrir. Merci. Plus nous serons nombreux à témoigner, plus les incrédules et les aveugles seront forcés de voir les choses comme elles sont.
Jean-Luc
Jean-Luc HERY- Messages : 147
Date d'inscription : 30/04/2016
Age : 53
Localisation : Sartrouville
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