témoignage

Bonjour,
j'ai aujourd'hui 70 ans et comme beaucoup d'autres, sans doute, je n'ai jamais parlé de mon histoire.
C’était en 1961 (ou 1962 ?) ; je devais avoir autour de 15 ans. Les  personnes en cause sont très certainement décédées aujourd'hui. Il s'agit de l'abbé B., alors aumônier du lycée Jacques Decour à Paris. Il était bien connu pour ses déviances et les rumeurs à l'époque étaient légion. Tout le monde savait, l’aumônerie était un véritable repaire aménagé avec lit en mezzanine mais le silence était la règle. L’autre, complice silencieux, était le père R. en charge à la même époque des scouts de la paroisse N.D. de Lorette à Paris.
En quelques mots : une randonnée à vélo avait été organisé cet été en Corse avec des jeunes de la paroisse, scouts et cœurs vaillants. Nous logions sous tente ou à la belle étoile quand ces deux abbés dormaient dans une estafette aménagée. Un soir, déjà assez tard, ils m’ont demandé discrètement de venir avec eux afin de surveiller l’estafette qu’ils sont allé stationner en bord de route à Bonifacio. Ils m’ont laissé là et sont partis à pied pour ne revenir que deux ou trois heures plus tard dans la nuit. Qu’étaient-ils allé faire  – sans « uniforme »  et en catimini - de nuit à Bonifacio ? Je ne le sais pas mais j’ai toujours eu des doutes sur la moralité de cette escapade furtive. Au retour, j’étais donc entre eux deux et le père B. m’a caressé le sexe et demandé qu’en retour j’en fasse de même pendant que l'autre abbé faisait semblant de dormir... Honteux, prisonnier, réticent.. Que dire ?
Bref.  Nous n’en avons plus jamais reparlé et mes camarades ignorant tout de cette virée nocturne, je ne l’ai jamais évoquée avec eux.
Je n'attends rien de ma démarche ; tout cela est parfaitement digéré depuis fort longtemps. Je ne mets plus les pieds à l'église depuis lors mais je continue à faire du vélo et je vais très bien. Je livre simplement ce témoignage pour information en imaginant et en espérant que le désir de transparence de l’église, même s'il est si tardif, est bien réel. Une pièce de plus au dossier qui vous aidera à montrer, si vous en avez l'intention, que ce phénomène était - s'il ne l'est pas aujourd'hui encore, ce que je crains - très répandu et banalisé.
Merci pour votre action, en espérant qu’elle permette de faire un vrai ménage et interdise à terme les silences qui entourent ces actes ignobles et dégradants.
Sincèrement

Merci à vous, pour ce témoignage.
Pour votre parole qui enfin se libère.
Nous avons reçu nombre de témoignage de gens de votre génération.
Avec une souffrance conservée si longtemps...

J'espère que d'en parler soulagera quelque peu cette dernière...